Politique du livre : objet de partage, objet de litige
Le Canada est un lieu propice pour observer le fonctionnement de la bibliodiversité (et les entraves à sa mise en œuvre) en raison du caractère plurilingue de son système éditorial, et de son modèle économique hybride, à la fois soumis aux lois du marché et fortement subventionné. L’univers de l’imprimé est un lieu de double politisation, et c’est bien ce que la notion de bibliodiversité rend visible: d’une part, parce qu’il est un univers médiatique qui fait circuler des idées (dont certaines sont considérées comme radicales) ; d’autre part, parce que les modes d’économies dont il fait partie sont eux-mêmes soumis à des tensions politiques. Il peut toutefois être périlleux de fétichiser l’objet livre et de le considérer systématiquement comme un objet d’émancipation. J’aimerais dans le cadre de cette conférence attirer l’attention sur des lieux de circulation du livre, où ce dernier est simultanément objet de partage et objet de litige. En portant mon analyse sur des librairies, des bibliothèques, des entrepôts d’Amazon, ou des free little librairies, je montrerai comment le livre agit comme catalyseur d’enjeux politiques plus larges : visibilité, équité, identités culturelles, travail, écologie. Je procéderai à une cartographie du livre et de son ancrage dans la communauté. Les discussions politiques autour du livre qui ont cours dans ces lieux de médiations, et les changements de pratiques qui en découlent, ont une réelle incidence sur la formation de l’espace public et des idées qui y circulent.