Perturber, créer et sensibiliser collectivement au nom de l’égalité entre les sexes

Blog
8 mars 2022
Auteur(s) :
Dr. Kathy Sanford, University of Victoria; Dr. Tanya Manning-Lewis, University of Victoria; Nabila Kazmi, PhD student, University of Victoria

Malgré l’inclusion de l’égalité entre les sexes en cinquième place des objectifs de développement durable de l’ONU (2015), une étude de l’ONU de 2019 a récemment souligné que le chemin vers l’égalité entre les sexes est une « entreprise inachevée dans chaque pays du monde » (p.1). Le Forum Génération Égalité (2021) a décrit la discrimination fondée sur le sexe comme « l’inégalité la plus durable et la plus déterminante de notre époque »; les problèmes causés par la montée des courants fondamentalistes et fascistes (Shameen, 2021) ont tenté de réimposer les valeurs familiales patriarcales hétéronormatives, et la violence fondée sur le sexe est en hausse.

Au Canada, l’Association canadienne pour l’étude sur les femmes et l’éducation (ACÉFÉ) crée depuis trois décennies des cadres pour la recherche et la pédagogie féministes — des cadres qui comprennent l’équité et l’inclusion dans l’éducation, les identités de genre et l’expression de genre, le leadership féministe, les méthodologies genrées et les intersectionnalités. Ces cadres permettent aux chercheur.euse.s d’examiner les moyens par lesquels nous pouvons collectivement travailler à la conception d’une vision et d’une conscience alternatives et à la sensibilisation du public à ce sujet, pour que chacune et chacun puisse comprendre à quoi pourrait ressembler, comment pourrait fonctionner un monde équitable du point de vue du genre, et comment les personnes pourraient s’y sentir.  

En tant que femmes issues de divers contextes culturels, sociaux et géopolitiques (Inde, Canada et Jamaïque), nos recherches ont individuellement et collectivement remis en question les normes et les pratiques intersectionnelles liées au genre — en particulier la colonialité des constructions de genre qui continuent d’imposer des restrictions sur le corps, les capacités intellectuelles et les rôles des femmes. Par notre travail, nous cherchons à perturber les discours et les pratiques hégémoniques, hétéronormatifs et colonisés qui ont étouffé les voix des femmes, tout en fournissant un cadre permettant de comprendre comment les privilèges et l’oppression sont vécus simultanément.

Bien que chacune d’entre nous soit issue de contextes socioculturels différents et reconnaisse les différentes manières dont les femmes vivent l’inégalité et l’oppression, nous partageons une conviction commune quant au besoin de plus en plus urgent et à la pertinence du travail sur l’équité entre les sexes dans nos espaces diversifiés et collectifs.

Alors que l’oppression continue de croître dans le monde et devient manifeste aux intersections d’une multitude d’identités mises à l’écart, l’importance du travail féministe devient d’autant plus significative.

Perturber 

Dans le cadre de ses recherches et de son enseignement, Tanya utilise les romans graphiques, la technique du photovoice et d’autres formes de narration pour remettre en question, raconter à nouveau et présenter à nouveau les expériences des femmes racialisées dans des contextes colonisés, notamment dans l’enseignement supérieur. Grâce à ces moyens convaincants et créatifs, les femmes de couleur sont libérées de la périphérie, leurs voix et leurs histoires devenant la force du changement. En s’engageant dans une analyse critique du discours ancrée dans l’intersectionnalité féministe, ce travail remet en question les politiques et pratiques institutionnelles colonisées qui sapent le travail des femmes dans le milieu universitaire.

Créer 

Nabila a recours à des ateliers pour faciliter la création d’espaces sûrs pour les jeunes femmes de couleur issues de contextes colonisés des écoles publiques en Inde. Ces espaces intersectionnels permettent aux jeunes femmes d’exercer leur pouvoir et de créer des communautés indispensables dans leur résistance aux pratiques oppressives et misogynes. Les jeunes femmes sont très surveillées dans les contextes au sein desquels Nabila a travaillé, et ses travaux démontrent comment l’activisme affectif peut aider les jeunes femmes à construire des communautés et des relations face à l’oppression partagée par les hiérarchies sexuées et les attentes qui les accompagnent.

Sensibiliser 

Les expositions publiques sont un outil puissant de sensibilisation à la discrimination fondée sur le sexe, à la misogynie et à la maltraitance des femmes. En collaboration avec l’International Association of Women’s Museums (IAWM), des universitaires féministes créent une exposition intitulée « Cultures of Headscarves » afin d’attirer l’attention, au niveau local et international, sur la désinformation, les mauvais traitements et les inégalités dont sont victimes les femmes de diverses cultures, classes, orientations sexuelles et nationalités. L’importance de ce travail est illustrée par le fait que des pays du monde entier continuent d’examiner minutieusement les femmes qui portent un couvre-chef, tel que le hijab porté par certaines musulmanes.

Lorsque les femmes se voient refuser l’accès aux espaces publics ou interdire l’exercice de leurs droits fondamentaux à l’éducation et au travail au nom de l’homogénéité ou de la similitude, les questions intersectionnelles du féminisme font surface. La perturbation des images des femmes comme appartenant à des groupes socioculturels ou religieux opprimés monolithiques peut se produire à travers des expositions, des ateliers et des pratiques pédagogiques. Une exposition de 2017 intitulée « Disobedient Women: Defiance, Resistance and Creativity Past and Present », organisée par notre collègue Darlene Clover de l’Université de Victoria, a attiré l’attention sur les actes de défi posés par des femmes qui ont contesté leur silence et leur mauvaise représentation dans le cadre des célébrations du 150e anniversaire du Canada.

The image is titled “Disobedient Women: Defiance, Resistance, and Creativity” and the images depict two classrooms with various pieces of art on display. L’image est intitulée « Disobedient Women: Defiance, Resistance, and Creativity » et les images représentent deux salles de classe où sont exposées diverses œuvres d’art.

À travers divers événements, conférences et ateliers, l’ACÉFÉ offre aux femmes l’occasion de partager des recherches qui mettent en lumière les inégalités, les injustices et les résistances liées au genre au Canada et ailleurs dans le monde. En tant que membres de la direction de l’ACÉFÉ, Kathy, Tanya et Nabila continuent à être encouragées par ces occasions d’entrer en contact avec des femmes de contextes locaux, nationaux et internationaux qui s’efforcent toutes de terminer « l’entreprise de l’équité entre les sexes » par la perturbation, la création et la sensibilisation.  

L'ACÉFÉ est une association de la Société canadienne pour l'étude de l'éducation (SCÉÉ).

A photo of Tanya Manning-Lewis, Kathy Sanford, and Nabila Kazmi smiling at the camera. Une photo de Tanya Manning-Lewis, Kathy Sanford, et Nabila Kazmi souriant à la caméra.

Tanya Manning-Lewis, Kathy Sanford, et Nabila Kazmi.

Références 

Forum Génération Égalité (2021) Accélérer les progrès en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Extrait de https://forum.generationequality.org/home.  

N. Shameen, Rights at risk: Time for action, 2021, AWID Toronto. 

Nations Unies UN75 2020 and beyond: Shaping our future, 2019, Nations Unies.  

https://esaro.unfpa.org/en/news/un75-2020-and-beyond-shaping-our-future-together